Réflexions et bananes flambées

Noir

août 19th, 2009 Posted in C'est compliqué !

Un soir d’hiver. Il fait froid, il fait humide, il fait nuit. Le père se penche vers son fils :

- Mon fils, il faut aller à la cave chercher du bois. Peux-tu descendre, s’il te plaît ?

La demande est anodine, la demande est légitime : le fils peut aussi participer aux tâches du ménage. Pourtant, quelque chose en lui se glace en l’entendant : dehors la nuit est noire. Dehors, il fait froid. La cave, c’est l’essence de cette obscurité, c’est de là qu’elle vient, c’est de là que vient le froid. Tout le mal monte de ses profondeurs mystérieuses. Et c’est là qu’il faut chercher du bois. Maintenant. Ça ne peut pas attendre demain…

Finalement, le bois sera monté, la poubelle descendue, les trésors de la cave quitteront la ténèbre pour trouver la lumière et la chaleur. Il était hors de question de montrer à ses sœurs qu’il serait allé n’importe où, sauf à la cave.

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Un soir d’été, il fait chaud, quelques années plus tard. Les lumières de l’âge de raison ont chassé ses peurs enfantines. La cave n’est plus ce lieu peuplé de menaces, la nuit n’est plus le domaine des monstres et des sorcières mais le moment du repos, le moment où enfin, le soleil laisse respirer le monde. Aujourd’hui, il est grand, il rentre chez lui dans l’obscurité, parce-qu’il n’a pas besoin de mettre de la lumière dans l’escalier – les marches, le couloir, sa porte, il les connaît. Mais ce fameux soir d’été, il a besoin, une nouvelle fois, d’aller à la cave.

Il prend l’ascenseur, c’est plus simple, ça évite d’avoir besoin d’une clé pour descendre. Quand la cabine est arrivée, il sort, laisse la porte se refermer doucement. Cet endroit, il le connaît : un couloir, un escalier. Ce qu’il a à faire est simple, pas besoin de lumière. Mais pourtant… pourtant, il fait bien sombre, là dedans ! Ici, ce n’est pas comme dans le couloir d’en haut, ici, l’obscurité est palpable, elle vit. Elle vit sans lui, sans avoir besoin de lui, il le sent, il le sait. Elle le rejette, il appuie sur le bouton, elle s’enfuit, vaincue. Pour l’instant.

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C’est tout de même bizarre de ne pas supporter cette obscurité à 30 ans passés. Il ne s’agit pas des couloirs de Cirith Ungol1, il s’agit là de la cave d’un immeuble parisien. D’où vient cette crainte ? Peut-être que je devrais m’entraîner un peu, et passer du temps au fond d’un puits à sec2…?

  1. quoique là dedans, l’obscurité serait vraiment vivante ! []
  2. je suis sûr qu’avec une batte de base-ball en mains, il n’y a aucune raison de s’inquiéter []
  1. 2 Responses to “Noir”

  2. By Mami on août 25, 2009

    Oui, OK, pas de problème, on viendra te chercher à la gare et te mettera dans le coffre de VOLVO bien noir…良い考えでしょう。

  3. By Anagrys on août 28, 2009

    Dans le coffre de la Volvo, ça ne devrait pas poser de problème. Ils fait aussi sombre, mais… c’est pas pareil, tout simplement :)

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